Article dans "Point Contemporain" ICI
"ENTRETIEN / JEAN-CHARLES BUREAU DIPLÔMÉ DES BEAUX-ARTS DE PARIS AVEC LES FÉLICITATIONS DU JURY EN 2016 PRÉSENTE POUR LA QUATRIÈME EXPOSITION DU FAUBOURG DES JEUNES ARTISTES (FJA), LE NOUVEAU PROJET DE LA GALERIE LE FEUVRE & ROZE AU 178 RUE DU FAUBOURG SAINT-HONORÉ À PARIS, « L’OUBLI S’ANNONCE ».
Point contemporain : Comment a évolué ta recherche au cours de tes années d’études aux Beaux-Arts de Paris ?
Jean-Charles Bureau : Ma pratique artistique c’est très vite fixée dans une volonté conceptuelle. Pendant mes études ma priorité a été d’affiner ma technicité afin de gagner en liberté de représentation et de continuer à m’ouvrir à d’autres médiums. Je travaille par tâtonnements, des idées apparaissent très vite mais je les laisse murir un certain temps dans mon esprit, je laisse les choses se faire. Les Beaux-arts de paris m’ont surtout donné l’opportunité d’avoir le temps d’acquérir du savoir et de la technicité, une rigueur de travailler seul et une capacité de concentration. Maintenant que le départ est lancé, ces années ont été très importantes pour avoir une base solide sur laquelle je peux tout remettre en question perpétuellement.
Comment décrirais-tu ton travail de peinture, tes influences et que cherches-tu à exprimer à travers ce médium ?
Je me suis toujours défini comme un artiste conceptuel utilisant la peinture figurative, la peinture c’est imposée à moi car c’est un médium dans lequel j’arrive à m’exprimer avec plus de subtilité.
Mon travail s’articule autour de la recherche du bonheur, non pas le bonheur idyllique contemporain mais basé sur la philosophie de Nietzsche, c’est-à-dire un bonheur qui se confronte à la dureté de notre réalité. En d’autres thermes un bonheur tragique dans le sens philosophique, qui regarde la réalité en face.
À travers cela je m’exerce à exprimer l’harmonisation entre bonheur et mélancolie et je vogue sur des sujets qui me touchent de près.
Le travail de la main a également son importance dans mon travail tant artistique que mon deuxième travail d’apiculteur. Le labeur non pas comme effort mais comme plaisir, l’ennui comme travail, Sisyphe heureux.
Je ne cherche pas à être un artiste « original », je ne cherche pas à trouver la nouvelle forme, je travaille avec ce qui existe, dans une volonté d’effacement et d’humilité. Des images et objets évanescents qui laissent une légère trace dans l’inconscient, toute en subtilité, ce qu’il faut pour amener à la réflexion. Mon travail est beaucoup influencé par la philosophie orientale et notamment asiatique.
Qu’est-ce qui a motivé ta participation au Faubourg des Jeunes Artistes ?
Une occasion de montrer son travail est toujours plaisante, ici l’occasion de faire une exposition dans ce petit espace me permet de montrer un état de mon travail, de ce qui s’est passé et de ce qui passe avec quelques oeuvres qui font un clin d’oeil à une exposition personnelle que je présente à Marseille.
Propos de Jean-Charles Bureau recueillis par Valérie Toubas et Daniel Guionnet © 2019 Point contemporain"
Article dans "TRANSFUGE" ICI
« Je suis un peu boulimique, comme
Picasso »
Par Damien Aubel
le Vendredi 07 Juin 2019
La jeune peinture n'en finit pas de bourgeonner,
et ses talents d'éclore. Parmi eux, et non des
moindres, Jean-Charles Bureau, qu'on a
rencontré lors du vernissage de son expo au
Faubourg des Jeunes Artistes.
Né à l'aube des nineties, déjà accroché, l'an dernier,
aux murs de la Collection Lambert (Avignon),
aujourd'hui heureux bénéficiaire d'un solo show au
Faubourg des Jeunes Artistes (extension de la
galerie Le Feuvre & Roze et vivier de jeunes
pinceaux), Jean-Charles Bureau porte bien son
patronyme. Il est à lui seul une petite entreprise, ou,
histoire de rester dans le ton, puisqu'il est aussi
apiculteur, une petite ruche bourdonnante d'activité
et de variété. Peintre manifestement figuratif (un
autoportrait en ouvrier du BTP, au rouleau
dégouttant de peinture blanche, une nature morte
aux parpaings), il revendique une démarche
« conceptuelle » ; coloriste précis, mais dans cette
gamme neutre qu'est le gris ; modeleur soigné des
objets et des corps, mais attiré par cette matière à la
fois brute et modeste qu'est le matériau de
construction, palettes, parpaings ; porteur du
flambeau de la peinture, art visuel « noble » s'il en
est, traditionnel, respectable, il puise aussi dans les
résidus sans grâce de notre modernité, à l'instar de
ce papier bulle appliqué comme un glacis, révélateur
et occultant à la fois, sur certaines toiles... Nulle
contradiction douloureuse pourtant – Bureau n'est
pas Flaubert écartelé entre « deux bonshommes
distincts » – mais la fécondité d'une noce
permanente des contraires, qui semble
communiquer au jeune peintre cette vivacité
passionnée avec laquelle il répond à nos questions
à la faveur du vernissage.
Vous vous présentez comme peintre « conceptuel », ce qui suppose un réservoir d'idées, de lectures.
Lesquelles ?
Je suis un lecteur de Nietzsche, le Nietzsche du tragique, de la confrontation au réel, de l'éternel retour, mais
aussi de l'oubli, un thème que je commence à explorer. Je suis très proche, aussi, de la philosophie asiatique,
de son éloge de l'ombre...
Vous évoquez des pensées souples, fluides, loin des programmes, parfois rigides, associés à l'art
conceptuel. Alors, c'est quoi pour vous être « conceptuel » ?
Je ne vais pas peindre un paysage pour le paysage : je dois avoir quelque chose à raconter. Je me vois comme
un passeur d'histoires, un conteur : c'est en cela que je me définis comme un artiste conceptuel, l'idée ou
l'histoire vont primer sur l'image. C'est d'ailleurs pourquoi je travaille aussi sur les objets – ils sont peu
représentés ici, mais dans mes expos il y a beaucoup d'installations aussi, il peut y avoir de la vidéo. Je suis
peintre, c'est là que je m'exprime le mieux, mais si ce que je veux raconter exige une installation avec du béton,
ou une vidéo, je change de médium. Je travaille beaucoup par ensembles, je n'ai pas de motifs récurrents, ça
change très vite. C'est sans doute la conséquence d'une boulimie de travail, et du refus d'être enfermé dans une
étiquette. A cet égard, mes artistes de référence sont Gasiorowski, qui soumettait sa peinture à un renouveau
permanent, et Kippenberger, peintre mais aussi installateur.
Mais vous aimez la peinture au sens le plus matériel, sa consistance, ses dégradés chromatiques, c'est
très perceptible...
Je ne cache pas que je suis peintre, j'ai un goût de la peinture. C'est toute la contradiction de mon travail, une
contradiction que j'aime : je me décris comme artiste conceptuel, mais il y a aussi le plaisir de la peinture, le
plaisir du travail. Un peu comme dans une ruche, c'est un labeur heureux, celui d'un Sisyphe heureux...Il s'agit
de trouver une harmonie. Ainsi, au centre de mes préoccupations, il y a la question du bonheur, et il va s'agir de
concilier bonheur et mélancolie.
Cette harmonie, c'est aussi celle des matériaux et des médiums, parfois très différents, que vous
employez ?
Je fais partie d'une génération pour qui le clivage entre abstraits et figuratifs n'a pas de sens, qui se fiche de la
mort annoncée de la peinture : on en fait donc elle existe ! Tout a été fait, mais peu importe. Je suis un peu
boulimique, comme Picasso, qui allait au Louvre emprunter des formes sans scrupules. Si quelque chose est
beau, je le reprends. Et il se trouve également que je ne viens pas du tout du milieu de l'art : j'ai des parents
ouvriers et j'ai découvert l'art à l'issue de mes études, en étant gardien de salle au Louvre. Face à la peinture, je
me suis dit : c'est ça que je veux faire. Je n'avais donc aucun a priori...
Certaines de vos toiles sont tendues de papier bulle, comme pour les masquer...
Je voulais d'abord faire disparaître les choses : ma peinture peut être monumentale, mais elle est assez simple
à appréhender, assez douce. L'idée est d'arriver à une certaine simplicité, derrière laquelle se dissimule le
travail.
Exposition Jean-Charles Bureau, L'oubli s'annonce, Faubourg des Jeunes Artistes, jusqu'au 27 juin "
Article dans "En revenant de l'expo" ICI
"Jusqu’au 30 juin 2019, Jean-Charles Bureau présente avec « Ébauche du silence » sa première exposition personnelle à HLM / Hors Les Murs, Marseille.
C’est sans aucun doute, un des accrochages les plus intéressants de la 11e édition du Printemps de l’Art Contemporain.
Sous le commissariat de Jean-Christophe Arcos, « Ébauche du silence » est une initiative de la Double V Gallery. Le texte de Jean-Christophe Arcos – reproduit ci-dessous – est suffisamment complet et explicite pour qu’on évite de le paraphraser…
Quelques mots toutefois sur la mise en espace et l’accrochage d’« Ébauche du silence » .
Construit autour de la ruche / maquette de l’exposition et d’une étonnante machine à faire des ricochets, Jean-Charles Bureau utilise avec beaucoup d’à propos le caractère singulier de HLM / Hors Les Murs.
Il y construit des perspectives obliques qui sont en cohérence totale avec son propos. Troublant avec malice son visiteur, « Ébauche du silence » multiplie les fausses pistes et les trompe-l’œil. Sa « peinture figurative conceptuelle », ses maquettes et leurs études préparatoires, son activité d’apiculteur sont magistralement mises en scène et interpellent avec force celles et ceux qui s’aventurent dans cette exposition…
Une mention pour les titres de ses œuvres et en particulier pour « Le perceur de bulles, 2019 », et son « protocole pour une œuvre inexistante » qui pourrait évoquer sa rencontre avec la Double V Gallery autour d’une activité de régie… Quant au film bulle, il est omniprésent dans cette « Ébauche du silence » !
Jean-Charles Bureau dont on avait pu apprécier son « Paradis en construction » à la Collection Lambert à Avignon lors de Rêvez #2 en 2017 devrait être bientôt accueilli par la galerie Le Feuvre.
À ne pas manquer !
N’oubliez pas de déguster son miel !"